
Il s'en est passé des choses en deux
ans pour la Gotthard team ! Départ de Mandy Meyer (guitare),
arrivée de Freddy Scherer, création du label G Point,
changement de management et bien sûr, l'enregistrement d'un
nouvel album - " Lipservice " - qui marque un certain
retour aux sources pour nos amis suisse. Steve Lee (chant) et
Freddy Scherer (guitare) s'expliquent.
Rock Time : Tout d'abord, pourquoi Mandy
Meyer a t-il quitté le groupe ?
Steve Lee : Je crois qu'il en avait marre
de ce style de musique et qu'il avait envie de faire autre chose
dont un album solo. Il était avec nous depuis cinq ou six
ans et a toujours été un peu à part. Mandy
est un excellent musicien et un type sympa mais il ne s'est jamais
réellement intégré au groupe. Il était
temps pour lui d'aller voir ailleurs, de réaliser ses envies.
Nous en avons discuté ensemble et cela n'a pas posé
de problème. La meilleure solution était de lui
rendre sa liberté. Je ne veux pas dire du mal de Mandy
mais pour être honnête, Freddy en a plus fait en trois
semaines pour Gotthard que Mandy en six ans ! Il n'était
pas souvent avec nous, outre pour les répétitions,
les concerts et l'enregistrement des albums. C'est quelqu'un qui
vit dans son propre monde.
Freddy, comment as-tu été engagé
et connaissais-tu Gotthard auparavant ?
Freddy Scherer : Tu dois savoir que j'étais
membre de China, groupe où Marc Lynn (Gotthard) officiait
en tant que bassiste. Nous nous sommes un peu perdus de vue pendant
plusieurs années avant de nous retrouver un beau jour à
Zurich. Par la suite, Leo (Leoni - guitare) m'a appelé
pour me dire que Mandy Meyer partait et qu'il y avait donc un
poste de guitariste à pourvoir. Je suis allé passer
une audition et hop, affaire conclue ! Je connaissais Gotthard
depuis longtemps mais pas personnellement, seulement leur côté
public. Lorsque j'ai répété avec eux, je
me suis tout de suite senti à l'aise, une sorte d'osmose
s'est instinctivement créée.
Quels furent tes antécédents
avant de rejoindre Gotthard ?
China, après des années d'absence,
s'est reformé en 1995 et nous sommes même venus jouer
en France ! Mais depuis le début du groupe, en 1985, rien
n'a jamais été stable. Ces changements incessants
de chanteurs, la pression due au fait d'être sur un label
important, ces come back à répétition étaient
fatigants. Tu ne peux pas tout arrêter puis relancer le
groupe encore et encore. Ce que je voulais, c'était un
petit groupe cool et c'est pourquoi j'ai fondé un projet
en parallèle. Nous étions trois et partout où
il était possible de jouer, nous étions là.
De 1986 à 1988, nous avons donné cinquante à
soixante concerts par an et c'est ce dont j'avais besoin. Nous
avons enregistré un album en cinq jours et je reconnais
qu'il n'est pas spécialement bon mais cela convenait parfaitement
au marché de l'époque. Après, j'ai fait un
break de deux ans avant de refonder un groupe : Liz Libido, lequel
a enregistré deux albums en six ans. Nous avons toujours
obtenu de bonnes critiques de la presse mais les ventes étaient
nulles et ce ne sont pas les critiques qui te remboursent tes
frais ! On a donc décidé de stopper la machine et
peu de temps après, on me contactait pour rejoindre Gotthard.
As-tu eu la possibilité de participer
à l'écriture du nouvel album ?
Oui et c'est une chose complètement inattendue
! Le groupe est là depuis quatorze ans, je suis le petit
nouveau alors je ne pensais pas qu'on allait me demander d'écrire
quoique ce soit tout de suite. Mais Leo et Steve ont tenu à
ce que je sois impliqué le plus rapidement possible. Chacun
a composé individuellement chez lui, j'ai enregistré
toutes mes idées, une quinzaine, puis les ai soumise au
groupe. Je me suis imprégné de l'esprit Gotthard
pour ce travail car selon le groupe avec lequel tu bosses, tu
dois t'adapter à leur style et ne pas proposer n'importe
quoi.
Steve : Je fus très surpris de
voir qu'il avait autant d'idées et des bonnes ! Il n'a
pas été facile de choisir dans le lot. Nous avons
d'ailleurs enregistré dix huit titres mais il n'y en a
que quatorze sur le cd. Le surplus figurera probablement sur des
face B de singles ou autre.
Je décrirai " Lipservice "
comme un croisement entre le "vieux" Gotthard (hard
rock/big rock) et le nouveau (plus axé sur le rock mélodique).
Qu'en penses-tu ?
Gotthard n'a jamais vraiment abandonné
le hard rock même si nous avons, ces dernières années,
inclus de nouvelles sonorités et des teintes pop/rock à
notre musique. On fait la musique que l'on ressent, je suppose
que c'est une question d'humeur mais le hard rock fait toujours
partie de nous et peut-être qu'il est plus présent
sur Lipservice qu'il ne l'était sur le précédent.
Cet album a été enregistré très spontanément
et je pense qu'il contient vraiment de bonnes chansons. Quoique
nous ayons pu faire, hard rock ou rock mélodique, l'esprit
Gotthard a toujours été présent. Je pense
que ce qui est intéressant c'est justement d'avoir varié
notre style au fil de nos huit albums. Enregistrer exactement
la même chose année après année génère
un sentiment de lassitude et ce n'est pas motivant.
Tout de même, le Gotthard d'aujourd'hui
s'est pas mal éloigné des premiers albums !
Il est vrai qu'après nos trois premiers
albums, nous avons opté pour des couleurs différentes,
une ambiance plus soft comme pour D.Frosted. Nous avons gagné
de très nombreux fans à ce moment là et nous
étions un peu inquiets de les perdre en enregistrant quelque
chose d'aussi heavy que G. par exemple. Soyons réalistes,
si tu veux vivre de ta musique aujourd'hui, il faut savoir faire
des compromis. D.Frosted est devenu double platine en peu de temps
et nous avons rallié à notre cause des gens qui
ne connaissaient absolument pas le groupe auparavant mais qui
ont été conquis par cet album. C'est la raison pour
laquelle tu ne dois pas t'attendre à ce que nous revenions
à 100% au hard rock de nos débuts. Cela dit, tu
trouveras toujours, à plus ou moins grande échelle,
des morceaux calibrés hard rock. En fait, c'est aussi une
question de son et c'est principalement sur ce point que ce jouera
la différence.
Votre premier simple "Lift 'U' Up"
contient quatre versions différentes du même morceau
! Qu'est-ce qui vous a conduit à cela ?
Freddy : De nos jours, tout le monde
met des bonus tracks sur les singles, EP, etc. Nous ne voulions
pas de ça et avons réfléchi à ce que
nous pourrions ajouter à ce premier single. Ces mixes différents
de "Lift 'U' Up" nous ont semblé sympas et amusants.
Mais attention, ce n'est pas à prendre comme du Gotthard,
juste comme des extras enregistrés pour le fun ! C'était
une expérience intéressante et les fans ont l'air
d'apprécier. Nous ne jouerons évidemment pas ces
versions remixées sur scène ! Nous pensons d'ailleurs
que les fans de hard rock n'achèteront pas le single mais
qu'ils attendront plutôt l'album.
La production de Lipservice est différente,
plus brute que celle de vos cds les plus récents.
C'est exact et c'est une production typiquement
américaine, signée Marc Tanner. C'est lui qui s'était
occupé du son de Human Zoo. Je me souviens qu'au moment
du mixage, Leo argumentait pour que les guitares sonnent d'une
façon plus rentre-dedans. Marc a pris ces propos en considération
tout en gardant en point de mire que l'album ne devait pas sonner
complètement hard rock. Finalement, Leo et lui se sont
mis d'accord et nous sommes très contents du résultat
final. Comme Je le disais, nous ne nous fixons pas sur un son
prédéfini ; celui-ci doit correspondre à
la nature des compos.
Qu'est-ce qui vous a incité a créer
votre propre label : G.Records ?
Tout d'abord, BMG a été racheté
par Sony et les personnes que nous connaissions depuis treize
ans, des gens avec qui il y avait un véritable échange,
s'en sont allés. D'autres sont arrivés mais ce n'était
plus pareil et nous avons jugé opportun de fonder notre
label à ce moment là. Bien sûr, ce n'est pas
évident au début mais d'un autre côté,
tu contrôles beaucoup plus de choses et c'est ce que nous
souhaitions. Autant faire les choses soi-même, quand tu
en es capable et c'est le cas, plutôt que d'engager une
tierce personne. Nous avons parallèlement changé
de management, de guitariste, alors autant tout bouleverser d'un
coup et repartir sur de nouvelles bases avec tes règles,
pas celles des autres. Cela a pris beaucoup de temps pour tout
organiser parce que nous sommes avant tout des musiciens et non
des hommes d'affaire mais aujourd'hui, tout va pour le mieux !
Il existe un groupe de reprises de Gotthard
: Streapsearch. Est-ce une fierté pour vous que l'on vous
rende hommage de la sorte ?
Oui, c'est sympa. Ces gars viennent d'Italie
et je sais que ça ne marche pas trop mal pour eux. Nous
avons joué ensemble plusieurs fois au cours de diverses
soirées et c'était très fun ! Heureusement,
ils assurent plutôt bien ! C'est d'autant plus gratifiant
que si ce groupe avait été mauvais ! C'est toujours
une fierté de voir que d'autres musiciens reprennent ton
répertoire parce qu'ils adorent ta musique.
Paolo Bolio fut le clavier de Gotthard pendant
de nombreuses années mais n'a jamais été
membre officiel du groupe. Pour quelle raison et pourquoi vous
a t-il quitté ?
Paolo acceptait le fait de n'être pas
membre de Gotthard, il savait que nous ne voulions pas d'un clavier
permanent au sein du groupe parce que notre style n'est pas basé
sur les synthés. C'était un ajout, histoire d'apporter
une certaine couleur à notre musique. Il a décidé
de partir de son plein gré pour expérimenter d'autres
choses.
D'où vient son remplaçant (Nicolo
Fragile) ?
Nicolo est italien et c'est un super pianiste
qui a joué avec de grands noms. Il a une sacré expérience
et s'avère plus rock'n'roll que Paolo ne l'était.
Cela se ressent dans sa façon de jouer. Un véritable
atout pour nous ! Nous l'avons rencontré en studio il y
a quatre ou cinq ans et il a déjà participé
à l'un de nos albums : Homerun. Nous n'imaginions même
pas pouvoir utiliser ses services à long terme car c'est
quelqu'un de très occupé, qui fait énormément
de production dans son propre studio. Et puis, tout ça
est devenu lassant pour lui et il a souhaité revenir au
rock'n'roll, jouer sur scène aussi. Tu parles d'une aubaine
pour nous ! C'est un type extra qui sert parfaitement la musique
de Gotthard.
Quelques mots sur la prochaine tournée
?
Nous allons d'abord rôder le show,
assurer pas mal de festivals d'été avant de réellement
attaquer la tournée en elle-même. Il est question
que nous revenions jouer en France en octobre/novembre. Notre
dernier passage chez-vous, au Plan, ne s'est pas passé
sous les meilleurs auspices. Ce n'était pas le bon moment
tout simplement. Olivier Garnier a beaucoup travaillé sur
Gotthard mais en nous présentant sous une image hard rock.
Le public s'attendait donc probablement à un concert heavy
alors que nous étions en plein dans l'étape D.Frosted
et qu'une grande partie de notre show était axé
sur les ballades et l'acoustique. La prochaine fois, vous aurez
droit à un show rock'n'roll !